Le 23 juillet 2024 à 12h28
Solitude
Communiste acharnée
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Le risque de ne pas parvenir à un accord au sein du NFP est de faire appaître cette coalition pour ce qu'elle est : une alliance électorale qui était destinée à maintenir Macron au pouvoir et à en éloigner le RN, en attendant 2027. Mais la victoire a poussé les dirigeants des quatre grands partis de la coalition (les communistes, les écolos, les socialistes et les insoumis) à reprendre les discussions au-delà du partage des circonscriptions.
« L'Express » nous apprend, dans un article sur les coulisses des discussions à gauche, que les carriéristes du Parti Socialiste (comme Pierre Jouvet, Boris Vallaud, Johanna Rolland) voulaient de longue date évincer Olivier Faure, l'actuel secrétaire du PS. Johanna Rolland (maire PS de Nantes) disait à Manuel Bompard (coordinateur de LFi) : « ce n'est pas Matignon qui se joue mais le rapport de force à gauche, entre vous et nous. Et donc les législatives dans un an s'il y a une nouvelle dissolution ou la prochaine présidentielle. » Le programme ? La victoire ? Aucune importance, seules les carrières politiques comptent.
Pendant la campagne des législatives, beaucoup de militant⸱es, sans naïveté, ont fait du porte-à-porte avec un argument fort : voter à gauche, ça peut changer la vie. Le risque de l'extrême-droite était très présent et justifiait une ambition de rupture qui fasse naître l'espoir. Le SMIC à 1600€ n'est pas la révolution, l'abandon de la réforme des retraites semble un minimum, le dégel du point d'indice est une nécessité et la réforme de l'école une évidence. Partant, voter à gauche, c'était retrouver la possibilité d'un monde meilleur et éloigner le danger fasciste. Ce projet est celui qui a convaincu.
Sauf que cette nécessité de la rupture n'était dès le départ clairement pas partagée par toutes les composantes du Nouveau Front Populaire. La France insoumise d'un côté souhaitait benoîtement l'application du programme, quitte à apparaître intransigeante, et le Parti Socialiste de l'autre côté, désirait négocier avec la Macronie. Cette différence stratégique est une différence de fond : le Parti Socialiste prend l'occasion de cette victoire pour réaffirmer son projet néolibéral. La ligne de Raphaël Glucksman apparaît de plus en plus comme la ligne centrale du PS.
Au sujet des partisans de cette ligne, Olivier Faure raconte dans « L'Express » que depuis bien avant les législatives, il ne se fait « aucune illusion. Plus ils sont prêts, plus je les vois. J'essaie toujours d'avoir un coup d'avance, mais peut-être qu'un jour j'en aurai un de retard. »
En face, rester fidèle au programme, pour noble que ce soit, apparaît comme un refus de gouverner. Le risque d'une absence totale de gain suite à cette élection est une possibilité maintenant bien tangible. Et si même en cas de victoire, rien ne se passe, rien ne change, alors la question se pose très légitimement : à quoi bon aller voter ?
Le temps joue en défaveur du NFP. L'absence de nom de Premier ministre et d'accord empêche un soulèvement populaire qui aurait pu contraindre Emmanuel Macron. Depuis le départ, le Président joue la montre, et cela fonctionne. Il a demandé hier une « trêve politique » pendant les JO. Et ce, alors même que le NFP se déchire autour de la présence des athlètes israéliens pendant les Jeux.
Du reste, certains éléments du programme s'éloignent à vue d'œil : les 19 élèves par classe à la rentrée, par exemple. Même avec un gouvernement constitué entièrement d'Insoumis, et sans aucun obstacle, comment faire avec la rentrée scolaire qui arrive ?
Déjà, les partisans de la ligne libérale du Parti Socialiste sortent du bois. On apprend que la scène où Jean-Luc Mélenchon aurait hurlé contre Olivier Faure est inventée de toute pièce. Lors de la réunion à laquelle Jean-Luc Mélenchon a assisté à distance derrière un écran, il n'aurait même rien dit de la soirée.
Le feuilleton des premiers ministrables après les élections s'éclaircit maintenant : le rôle des écologistes, qui ont fait capoter l'hypothèse Huguette Bello, sans l'assumer, mais surtout la volonté du Parti Socialiste de retrouver sa place dans le jeu politique, quitte à abandonner le programme, et donc peu importe les salaires, les retraites et tout le reste.
C'est pourtant bien là-dessus que Laurence Tubiana a été écartée par LFi : « la candidate défendue par le PS manque de clarté sur sa volonté d'abroger la réforme des retraites et de mettre en place rapidement, par décret, le Smic à 1600€, » selon Paul Vannier (LFi) dans « L'Express ». Sa proximité avec Emmanuel Macron, qui l'avait déjà envisagée comme Première ministre hors victoire de la gauche, laisse sceptique au sein de LFi.
Laurence Tubiana (présidente de la convention citoyenne pour la transition écologique, et dont le nom avait été proposé par le PS) vient de renoncer à l'idée de devenir Première ministre. Elle était soutenue par les écologistes : Yannick Jadot et Marine Tondelier soutenaient activement sa candidature, et se voyaient déjà ministres.
Des noms circulent encore (André Chassaigne, Cécile Duflot, Benoît Hamon), mais l'absence d'accord rapide est un très mauvais présage pour l'espoir qu'avait levé le programme. François Ruffin a déjà annoncé que c'était « trop tard » pour Matignon. La France insoumise dépose un projet de loi d'abolition de la réforme des retraites sans attendre, ce qui sonne comme un aveu d'échec. Jean-Luc Mélenchon dénonçait la tambouille politicienne. Il ne fallait pas y goûter.
Vindicte - dernière mise à jour le 26 juillet 2024
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